Un bouffée d’air frais pour les entreprises…
Le 25 Mars 2020, conformément à l’annonce du président de la République et sa célèbre formule du « quoiqu’il en coûte », le gouvernement, en collaboration avec l’ensemble du réseau bancaire mettait en place le dispositif de Prêt Garanti par l’Etat (PGE). Près de deux ans plus tard, les perspectives d’une sortie de crise restent toujours incertaines pour un grand nombre de petites entreprises. Le 19 janvier dernier, un accord entre le gouvernement, l’OCE et la FBF a été signé permettant aux TPE en difficulté d’obtenir un étalement de ce prêt.
Pour rappel, le PGE prévoyait initialement un étalement de l’emprunt pour une durée maximale de 5 ans auquel s’ajoute un différé minimum d’un an. Depuis la semaine dernière, il est dorénavant possible pour les entreprises les plus en difficultés et ayant emprunté moins de 50 000 euros, d’étaler leurs paiements jusqu’à 10 ans ou encore augmenter le différé d’amortissement de six mois. Des mesures qui « bénéficieront plus largement aux petites entreprises impactées par la crise mais qui restent en capacité de rebondir » selon le président de l’Union des Entreprise de Proximité (U2P), Dominique Métayer. Ainsi, ce seront un peu moins de 25 000 entreprises qui pourront bénéficier de cet étalement du PGE.
… mais un risque d’étranglement par la dette.
Ce nouvel assouplissement des conditions de remboursement des PGE nous interroge cependant sur les conséquences à long-terme sur l’économie du pays. En effet, dès la mise en place des PGE, nombre d’experts mettaient en garde d’un risque de « zombification » de l’économie française : les PGE permettant la suivie d’entreprises qui auraient dû faire faillite. Ce sont près de 690 000 entreprises qui ont ainsi pu bénéficier d’un PGE depuis le début de la crise. Il est donc certain que parmi elles, certaines n’étaient pas rentable avant même la crise, d’autres ne le seront jamais dans le « monde d’après » covid.
Dans un rapport d’information de Jean-François Husson fait au nom de la commission des finances, celui-ci s’inquiète des répercutions du dispositif PGE sur les entreprises françaises. Il craint en effet un surendettement des entreprises qui, dans certains secteurs d’activités, ont très largement profité du PGE pour compenser leurs pertes. M. Husson décrit ainsi un double risque porté par les entreprises sur le long terme : une augmentation du nombre de faillites, y compris d’entreprises intrinsèquement viables et productives, mais aussi une réduction de leurs dépenses d’investissement. Ce phénomène que les économistes appellent « étranglement par la dette » pourrait peser considérablement sur la capacité de l’économie française à rebondir après la crise et pourrait même, toujours selon M. Husson, « menacer durablement nos capacités de production ».
Bien que l’intervention de l’Etat eût été nécessaire pour préserver le tissu économique français, l’enjeu d’aujourd’hui est de savoir comment contrecarrer la menace du surendettement qui pèse sur les entreprises françaises. La proposition d’étalement des PGE mise en place le 19 janvier dernier ne constitue qu’une solution temporaire. Plusieurs pistes ont ainsi été étudiées afin d’anticiper une vague de défaillances d’entreprises viables en améliorant leur solvabilité. Parmi elles, un accompagnement complémentaire des entreprises, des déductions fiscales ou le plafonnement de certains prêts afin de favoriser la levée de fonds propres. Des mesures décrites comme un véritable « service après-vente des PGE » par M. Husson pour soutenir la reprise de l’économie.
L’intervention de l’Etat et sa politique du « quoi qu’il en coûte » a donc permis aux entreprises françaises de tenir face au choc économique de la crise sanitaire dans un premier temps. Il nous reste maintenant à observer s’il sera en mesure d’accompagner au mieux les entreprises dans leurs « sortie du PGE ». Malgré un taux de défaillance relativement bas (3,6% annoncé par Bruno Lemaire, ministre des Finances, lors d’une interview sur BFM le 19 janvier 2022), la question budgétaire reste en suspens. La dette souveraine qui fut l’objet d’une crise financière historique en 2011, est aujourd’hui la solution économique préconisée par l’ensemble des économies développées. Un paradoxe qui devrait peut-être nous inquiéter…